low life (mina)

les pupilles dilatées par la drogue, sans parler de l'alcool qui ce mélange à ton sang, ce soir t'es pas beau à voir. les cernes sous tes yeux sont là pour affirmer la chose, ça fait déjà plusieurs nuits que tu n'as pas fermé l'oeil. alors plutôt que rester dans l'appartement à chercher un sommeil qui ne viendra pas, t'es venu du railway bar, accompagné par deux gars avec qui t'as grandis. assit sur un canapé, t'enchaines les shots d'alcool tout en parlant de tout et n'importe quoi. ce n'est pas l'endroit que tu préfères, mais la bouffe est bonne ici. et puis y'a cette serveuse que t'aime bien, emily. c'est toujours elle qui vient te servir et t'en profite pour reluquer son maxi décolleté. t'es qu'un putain de goujat ted mais ça ça te fait marrer. les filles qui te connaissent sont au courant que t'es incapable de t'engager et qu'il ne vaut mieux pas te parler de maison, de gosse et tout le tralala. t'es pas prêt pour ça, tu l'sera certainement jamais d'ailleurs. en attendant tu préfères faire couler une gorgée de vodka dans ta gorge tandis que ton pote te raconte l'histoire d'un deal qui a mal tourné. les yeux rivés sur la piste de danse, t'observes, silencieux.

elle se dégage de ton emprise, manque de tomber encore une fois. et toi tu la regardes. elle tient à peine sur ses jambes et pourtant elle essaye (encore) de se donner un genre. comme si elle était habituée à tout ça, à tout cet alcool dans le sang. toi t'es défoncé, mais pas assez pour ne pas avoir les idées claires. fait pas chier mina. tu regardes autour de toi un instant, t'essaye de trouver une de ses copines mais y'a personne. tu préfères que j'te laisse toute seule p'être ? tu la fusilles du regard. elle a intérêt à bien réfléchir avant de répondre, parce que si elle te jette tu ne reviendras pas.

la réponse de mina ne se fait pas attendre. finalement p'être qu'elle ne joue pas avec toi, p'être qu'elle n'est qu'une gamine qui ne sait pas ce qu'elle veut. alors tu la laisses, tu t'éloignes, jouant des épaules pour te faire un passage. ce soir le bar est bondé, c'est soirée happy hour alors forcément ça attire du monde, un peu trop peut-être. tu cherches tes potes du regard, ceux avec qui tu es arrivé. t'en trouves un sur la piste de danse en train de se frotter à une fille en mini robe tandis que l'autre n'a pas bougé depuis thaleur, il est assit au fond, sur le canapé, à enchainer les shots d'alcool. tu vas certainement faire comme lui et finir ta nuit sur la plage, accompagné d'une fille ou d'une bouteille de vodka. p'être les deux. tu ne t'attends pas a c'que mina te suive, tu t'attends encore moins à ce qu'elle s'éclate la tronche par terre en essayant de t'attrapper. ce sont les rires qui t'obligent à te retourneret quand tu vois la blonde à tes pieds, t'as pitié. tu pourrais faire le gars qui ne la connait pas, tu pourrais t'en foutre et partir sans rien dire. et pourtant t'y arrives pas. tu peux pas la laisser là, comme ça. tu t'accroupis pour être à sa hauteur et tu la regardes droit dans les yeux. t'as fini de faire la maligne maintenant ? ta main tendue vers elle, tu l'aides à se redresser. aller viens, on va te trouver un coin tranquille. mina elle a le droit de profiter du peu de bonté qu'il te reste, elle en a de la chance.

ta main dans la sienne, tu la tires vers un endroit calme, une table au fond de la pièce, un peu caché du reste du monde. docile, elle te suit sans broncher cette fois. elle te souffle un merci que tu fais mine de ne pas entendre, parce que t'as pas envie d'être remercié ni rien. tu veux manger un truc ? faut éponger l'alcool qu'elle a dans l'estomac, mais tu ne vas pas non plus l'obliger à avaler quoi que ce soit. ça se voit qu'elle n'est pas à l'aise, elle n'a rien à faire dans cet endroit et encore moins dans cet état. t'es content de l'avoir croisée, d'une certaine façon, maintenant tu sais que parfois elle peut sortir de sa zone de confort, qu'elle franchit les limites qu'elle n'osait pas dépasser. ta chute m'a impressionné, ouais. un mince sourire étire tes lèvres, finalement ce n'est pas si marrant que ça. enfin, un peu quand même. ça te rappelle tes premières cuites, t'étais pas frais toi non plus, à finir ta nuit à vomir tes tripes dans les toilettes.

toi en tout cas ton estomac est en bon état, alors dès qu'un serveur passe prêt de toi tu lui demandes un kamikaze, cocktail qui porte bien son nom et qui retourne le cerveau des plus faibles en un rien de temps. t'inquiète c'était pas si horrible. tu la regardes, pendant deux secondes t'essaye de rester sérieux, mais au final tu peux pas t'empêcher de lâcher un rire. dis toi que les gens sont tous bourrés, demain il ne se rappelleront pas de toi. ou peut-être que si, personne n'en sait rien. le serveur revient avec ton verre et tu glisses un billet dans sa main. t'en a de l'argent pour un simple livreur de pizza, mais la plupart du temps les gens n'y font pas attention. tu fais toujours des heureux quand tu offres des tournées générales. tu fais couler une gorgée d'alcool dans ta gorge avant de reposer tes yeux sur mina. désolé, j'fais pas de promesses. elle est là, avec ses joues roses et ses grands yeux bleus, limite en train de te supplier. autant être franc direct. et sinon t'es venue toute seule ? t'es curieux de savoir où sont passés ses copines.

la musique cogne dans ta tête, tu sens les basses jusque dans tes os. mina te dit qu'elle est venue avec sa meilleure amie. ça t'arrache un petit rire. elle est pas cool de te lâcher comme ça. surtout dans son état. surement qu'elle a laissée mina toute seule pour finir avec un gars dans les toilettes du bar ou p'être pas. après tout t'en sais rien, tu penses que les gens sont tous les mêmes, mais c'est surement faux. tu termines ton verre d'un seul trait et tu l'fais glisser entre tes mains sur la table. j'suis pas capable de les tenir, alors j'préfère ne pas en faire. pas foutu d'être quelqu'un de parole. t'es trop impulsif pour promettre quoi que ce soit, alors tu l'fais pas, jamais ou presque. tu passes une main sur ton visage, la drogue que t'as avaler plus tôt ne fait plus effet, t'es en train de redescendre et ça ne te plait pas du tout. ça va ta tête, t'as pas mal ? tu te tournes un instant pour observer la piste de danse avant de revenir sur mina et tu lui souris sans vraiment savoir pourquoi.

elle te regarde, tu le sens. ses yeux qui te détaillent, tu voudrais savoir quelles sont les pensées qui se bousculent dans sa tête. elle a raison, personne ne peut avoir que des qualités. et toi tu fais partie de ceux qui en ont le moins, tu les caches pour faire ressortir tes défauts. arborer une carapace pour ce prôtéger c'est la première chose que ton père t'as appris parce que dans le quartier où tu vivais c'était obligatoire pour ne pas se faire bouffer. tu t'enfonces dans ta chaise tandis qu'elle te demande de lui trouver de la glace. la princesse aime se faire servir on dirait. tu peux aller au bar, ils t'en donneront. faut pas abuser, qu'elle ne te prenne pas pour un preux chevalier ou une connerie du genre. ou alors elle a juste peur de ne pas tenir sur ses jambes, tu t'fais surement trop de films. j'sais pas si je dois prendre ça comme un compliment ou.. c'est la première fois qu'ont te la sort celle là, que tu fais peur. remarque elle ne doit pas souvent croiser des gars comme toi dans son église, alors pour elle t'as surement le visage du diable ou un délire du genre. t'as pas de couvre feu ? papa cobain doit faire les cent pas dans son salon à savoir que sa fille est dehors.

elle te parle d'aller en enfer et ça te fais rire. parce que à certain moment de ta vie tu as vraiment cru y être, en enfer, ou du moins en frôler les portes. tu regardes mina qui galère pour réussir à aller jusqu'au bar. elle se cogne dans tout ce qui se trouve sur son chemin et ça te fais rire. manquerait plus qu'elle se ramasse encore une fois et ce serait la cerise sur la gâteau. après ça elle n'oserait même plus mettre le nez dehors. elle revient mina, tu ne sais pas trop comment, mais elle rejoint sa chaise en plaquant sa poche de glace sur sa joue endolorie. et c'est quoi tes 'morales' ? la limite tu veux dire, t'es curieux de savoir. t'es en train de te rendre compte que mina elle n'a surement jamais pris de drogue de sa vie, et que l'alcool, clairement elle n'a pas dû en boire beaucoup. elle n'a jamais connu le frisson de faire quelque chose d'illégal, connaitre la sensation que provoque l'adrénaline qui monte dans les veines. pas encore, non. tu profites d'avoir mina sous la main pour la connaitre un peu plus. tu fais quoi dans la vie mina ? j'veux dire à part quand t'es à l'église et tout ça ? y'a emily qui s'approche dans ton dos, tu sens ses deux mains qui se posent sur tes épaules et elle chuchote quelques mots à ton oreille qui te font sourire. puis elle repart pour reprendre sa place derrière le bar. tu reposes tes yeux sur mina, curieux de savoir ce qu'elle va répondre à ta question.

elle s'ouvre à toi, se dévoile petit à petit et ça te fais plaisir de l'entendre. dans ta tête mina elle a peur de vivre, enfin, elle vit, mais qu'à moitié. du moins toi c'est comme ça que tu vois la chose. tu l'écoutes d'une oreille attentive, tu bois ces paroles avec ton petit sourire au coin. et quand elle t'avoue que si elle a bu ce soir, c'est parce qu'elle à foiré son examen de math, tu ne rigoles pas parce que tu n'es pas si étonné. mina c'est le parfait cliché de la fille qui fait ce genre de truc. qui pense que sa vie est foutue parce qu'elle s'est tapée une mauvaise note ou que son père n'est pas content d'elle. tu te redresses sur ta chaise et tu poses tes coudes sur la table. tu te penches un peu plus vers mina, tu la regardes. t'as pas l'impression de jouer un rôle ? c'est vraiment toi tout ça ? par tout ça tu sous entend l'église, le fait de jouer à la fille sage et parfaite. tu te demandes juste si mina elle ne rêve pas d'autre chose au fond.

mina elle s'énerve direct, faut croire que tu n'as pas choisis les bons mots pour t'exprimer. finalement elle est vraiment dans son truc de fille à papa, tu l'pensais pas. tu pensais qu'elle aurait pu céder plus facilement, mais non. ça va détend toi. au moins maintenant tu sais qu'elle est capable de s'énerver. tu jettes un coup d'oeil autour de toi, la salle s'est vidée depuis toute à l'heure, en tout cas tes potes ils sont plus là. et toi t'en a marre d'être ici, tu as besoin de respirer l'air frais et de fumer un ou deux joints. j'te ramène où tu rentres toute seule ? peu importe. tu te lèves et tu te diriges vers la sortie. tu ne manques pas de jeter un regard à emily, penchée sur le bar en train de parler à un gars. tu passes la porte de l'établissement et t'es enfin dehors. la rue est déserte, tu sors un paquet de cigarettes de la poche de ta veste et t'en cales une entre tes lèvres que tu allumes aussitôt. tu n'as pas laisser à mina le temps de te répondre alors t'attend qu'elle sorte à son tour.